Dans mes années de toute petite fille, je me demandais qui était ce lampiste dont mon père parlait avec véhémence. C'était toujours lui qui devait trinquer, payer la note, porter le chapeau, ramasser les pots cassés, et ce n'était pas le moment de poser des questions à mon père dans ses grands envols de diatribe contre l'injustice. J'avais fini par l'identifier, ce lampiste, comme le brave homme à l'air si triste qui venait tous les quinze jours vérifier la santé de la chaudière de l'école, laquelle, bien que sise au sous-sol de notre cuisine, ne répandait pas jusqu'à nous les bienfaits du chauffage central municipal (et pourtant c'était mon père qui, à sept heures tous les matins, devait rallumer le gaz de l'engin pour assurer le confort des scolaires). Il ne doit plus y avoir de lampistes de ce genre, ou la fonction a bien dû évoluer. Car si j'ai bien compris, quand en haut lieu on a besoin de sanctionner, plutôt que d'agir en fonction des résultats des enquêtes quelles qu'elles soient on fait tomber les têtes, aussi sec! Si ce n'est pas un général qu'on pousse à la démission avec des mots déplaisants ("C'est moi le chef, sachez-le!") c'est un préfet qu'on vire sans tambour ni trompette. Moi les préfets...c'est comme Moi les mammouths...On se fréquente pas de trop près, et puis j'aime pas trop non plus leur manière de tout refuser aux sans logis et aux immigrés. Mais tout de même, les triples rangées de feuilles de chêne dorées sur leur casquette, ça impressionne. Eh ben M. Macron, ça l'impressionne pas du tout. A preuve : les assassinats de la gare Saint-Charles, le préfet n'avait qu'à les décommander, il l'a pas fait, il peut s'en mordre les doigts maintenant. C'est qu'il rigole pas avec la justice, M. Macron.
